Association culturelle (loi du 1er juillet 1901)
N° SIRET 410 226 518
00059
Madame
la Préfète
Monsieur
le Député
Madame
la Représentante de la Municipalité de Moulins
Mesdames
et messieurs représentant les autorités civiles et militaires et des associations
Mesdames
et Messieurs les Porte-Drapeaux
Mesdames
et Messieurs et chers amis de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation
Nous
sommes désolés, mais nous allons être un peu plus long que d’habitude. Notre
intervention se déroulera en 3 parties :
1ère
partie : Protestation
2ème
partie : Résistance Hommage aux déportés du Maquis de Châtel-Montagne La
Pourrière
3ème
partie : Invitation
Visite
de la Mal-Coiffée : Présentation, visite des cachots/mitards attention aux
marches, Maurice TINLAND, grand résistant moulinois et maire de Moulins.
Remerciements
à Madame Yasmine LAÏB RENARD, Directrice des Musées Nationaux et à Farid SBAY.
Protestation
La
loi n° 54-415 du 14 avril 1954, votée à l'unanimité par le Parlement de la
République française, a consacré le
dernier dimanche d'avril « Journée
nationale du Souvenir des victimes et héros de la déportation », au cours
de laquelle la nation honore la mémoire de tous les déportés sans distinction, et rend
hommage à leur sacrifice.
La
cérémonie à Moulins avait lieu
traditionnellement à 11 heures. Cet horaire nous convenait parfaitement, car nous avons des adhérents qui viennent de
départements extérieurs à celui de l’Allier.
Lors
de la réunion des associations d’anciens combattants à la mairie de Moulins le
6 mars 2018 on nous informe que la Municipalité de Moulins a pris la décision
unilatérale d’avancer à 9H30 l’hommage aux déportés… et ceci pour ne pas
déranger l’office religieux de Monsieur le Curé à la Cathédrale par les hymnes
à la Résistance (Chant des Partisans), Déportation (Chant des
Marais) hymne national (La
Marseillaise) et un des participants à
la réunion a même cru nécessaire
d’ajouter « et surtout au moment de l’Elévation »
Le
17 mai nous recevons par Internet un message de la mairie de Moulins que la
cérémonie commencera à 9 heures au lieu de 9 H 30. Lors de l’ échange téléphonique
qui suit, il nous est dit sur un ton
quasi comminatoire « Tout devra être terminé pour 10 heures » et qu’il est envisagé de transférer l’année
prochaine la cérémonie de la
Déportation au square du Général Leclerc. Pourtant, à moins d’être analphabète ou aveugle, nous sommes ici à notre place.
Indiquer
les plaques : « Place de la Déportation ».
« 1940-1944 en mémoire de ceux qui
furent enfermés en ce lieu martyrisés fusillés ou déportés »
« La République Française en
hommage aux victimes des persécutions racistes et antisémites et des crimes
contre l'humanité commis sous l'autorité de fait dite "Gouvernement de l'Etat Français" (1940-1944)
N'oublions jamais ! »
Nous
protestons, car cet horaire nous a été imposé sans que nous ayons été consultés.
Cette
absence de concertation de la part de la Municipalité qui a préféré se
concerter avec Monsieur le Curé représente
-
un manque de respect pour notre association qui œuvre depuis des années pour la
mémoire de la Déportation en général et
de l’Allier en particulier sur notre site Internet. Dans l’Allier nous avons
effectué « le travail de mémoire « dont parle Madame Geneviève
DARRIEUSECQ, secrétaire d’Etat auprès de la Ministre des Armées,
C’est
aussi - un manque de respect pour les déportés eux-mêmes, qu’ils aient été
déportés par mesure de répression ou par mesure de persécution
-
un manque de respect pour la République. La République est laïque de puis la
loi de 1905. Et nous pensions naïvement qu’elle était et devait rester prioritaire.
Nous
ne sommes pas des anticléricaux, Nous entretenons de courtoises et
respectueuses relations avec la communauté juive de Vichy. Nous sommes
plusieurs fois intervenus dans des églises lors des obsèques de déportés pour
faire leur éloge funèbre comme nous sommes intervenus à la synagogue de Vichy.
Cela ne nous pose aucun problème existentiel.
Nous
sommes des républicains, c’est-à-dire
que nous sommes respectueux des religions qui respectent la République.
Nous voulons rappeler certains faits historiques à Monsieur le Curé et à la
Municipalité de Moulins ;
Selon
le livre mémorial de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation Tome 1 page
175, « Au total 2 271 religieux sont comptabilisés à Dachau,
dont 700 y meurent et 300 disparaissent
au cours des transports d’évacuation.
156 prêtres français y sont déportés dont Monseigneur PIGUET, évêque de
Clermont-Ferrand et le père Michel RIQUET »
Guillaume ZELLER dans son article paru dans
le Figaro du 27 janvier 2015, confirme
et précise « Pour leur part, des
prêtres français -ils sont 156 à Dachau- sont déportés en raison de leur
participation active à la résistance » .
Monsieur
le Curé de Moulins se trompe de résistance !
Monsieur
le curé, nous rappelons que cette cérémonie a lieu une fois par an. Alors un peu de charité chrétienne envers tous ces déportés martyrisés
par la Gestapo, le sinistre Hugo GEISSLER,
chef de la Gestapo de Vichy, venait régulièrement à la Mal-Coiffée pour
interroger les prisonniers. Quand nous
disons interroger, vous imaginez quel genre d’interrogatoire pouvaient
subir les prisonniers, martyrisés aussi dans les camps de concentration et
d’extermination par le gaz ou le travail. Ces
déportés ont eux aussi porté leur croix. Eux aussi ont subi un long calvaire de
la part des apôtres de la haine raciale que furent les nazis et leurs
collaborateurs français.
En
conclusion de cette première partie, nous demandons que l’année prochaine soit
rétabli l’horaire antérieur et il est hors de question que la cérémonie ait
lieu ailleurs comme cela a été suggéré. La mémoire des déportés est ici,
Hommes, femmes et…. enfants dont nous vous rappelons que le plus jeune Michel
CRESPIN a été assassiné à l’âge de 5 mois à Auschwitz parce que coupable d’être Juif.
2ème Partie : la
Résistance.
Nous
rappelons qu’il y a 2 sortes de déportation
1)
Par mesure de persécution non pas parce qu’ils ont fait quelque chose, mais
parce qu’ils sont ..Juifs, homosexuels ou Tsiganes. Dans l’Allier ne sont
concernés que les Juifs.
2)
Par mesure de répression : a)Résistance
individuelle ou collective (dans un maquis ou dans les réseaux ) considérés
comme des « Déportés résistants », mais aussi droits communs c’est-à-dire qui ont commis des délits souvent
mineurs, rafles des « pas de
chance » qui sont au mauvais endroit au mauvais moment qui sont
considérés comme des « Déportés politiques ».
Aujourd’hui
nous avons choisi de vous parler d’un
maquis, le Maquis de la Pourrière près de Châtel-Montagne pour rendre hommage à
2 jeunes de la région moulinoise.
Henri
NAVROT né le 30 septembre 1925 à Saligny-sur-Roudon (03), et Jacques VINCENT né
le 31 décembre 1924 à Valenciennes (59)
Selon
les archives de Paul CHAMPEAU, l’un des maquisards, l’intellectuel du groupe
qui a arrêté ses études de Lettres Classiques à la faculté de Clermont-Ferrand,
pour rejoindre le Maquis, ce Maquis a commencé
en juin 1943 à Saint-Nicolas-des-Biefs (03) et appartenait à l’A.S.
(Armée Secrète) sous la direction de Roger KESPY et d’André MANDART.
Le
maquis se déplace régulièrement en Montagne Bourbonnaise pour ne pas se faire
repérer : Saint-Nicolas-des-Biefs, Saint-Clément, Arfeuilles et le 23
décembre 1943 au lieudit la Pourrière à Châtel-Montagne.
Statistiques concernant la composition du Maquis de la
Pourrière
Sur
les 23 hommes, 18 sont nés dans les années 1920, donc ils ont pris le maquis
pour échapper au STO, Service du Travail Obligatoire
Rappelons le temps d’un sourire
que le 16 février 1943, une loi de l'État français
institue le Service Obligatoire du Travail, le SOT rebaptisé très vite
Service du Travail Obligatoire (STO) en raison des moqueries suscitées
par ses initiales.
Selon cette loi instituée par Pierre Laval le 16
février 1943, les hommes nés au 4ème
trimestre 1919 ou en 1920-1921-1922 doivent aller travailler pendant 2 ans en Allemagne.
16
sont nés en France, mais la Résistance internationale est aussi représentée.
2
sont nés en Algérie
2
sont nés en Italie
2
sont nés en Pologne
1
est né en Autriche
Selon
Paul CHAMPEAU, le 4 février 1944 le
Maquis est encerclé par les GMR (Groupes Mobiles de Réserve) du Groupe Quercy
sous la conduite de GOUVERNEUR, un milicien infiltré, et du milicien FRADIN. Paul CHAMPEAU raconte: « L'ennemi
disposait d'une écrasante supériorité, tant
par la position que par le nombre et l'armement (…). Il ne fut aperçu de
nous qu'au dernier moment, alors que le cantonnement était étroitement
surveillé. Il nous fallut capituler, subir la fouille et les menottes, le tout
accompagné des sarcasmes de Fradin qui prit plaisir à faire un appel nominatif
du groupe d'après la liste que lui avait fournie Gouverneur».
Les 23 maquisards présents sont arrêtés par le GMR
et incarcérés à la prison de Cusset (03), puis de Riom (63).
Le 28 juin 1944 la prison de Riom est vidée
de ses 182 détenus qui partent en car pour Compiègne.
Le
2 juillet 1944, ils sont dirigés avec leurs camarades sur Dachau par le convoi
N° I.240 surnommé «Le Train de la Mort». Selon le livre mémorial de la
Fondation pour la Mémoire de la Déportation Tome 2, ce convoi est composé de
2162 hommes
«Lors d'un arrêt prolongé du train en gare de St Brice près de
Reims, par temps orageux et quarante degrés à l'ombre, les wagons se sont
transformés en véritables étuves…Plus de cinq cents jeunes hommes sont morts de
chaleur, de manque d'eau, d'asphyxie. L'atmosphère (…) a été génératrice de
délire et de folie collective, entraînant des scènes d'horreur.
La responsabilité en incombe aux S.S. de la garde. Au moment où
la situation devenait intenable, malgré les appels de détresse des détenus, les
S.S. ont refusé d’ouvrir les portes, d’aérer les wagons et de distribuer l’eau,
ce qui eut sauvé les mourants.
Il s’agit en la circonstance, ni d’une « bavure » ni
d’un accident, mais essentiellement d’une action entrant dans le cadre de
« l’entreprise générale et délibérée d’élimination des ennemis du Reich,
de caractère authentiquement criminel » fin de citation selon le Mémorial
annuaire des Français de Dachau.
(Avec votre permission, parenthèse personnelle : mon père Raymond DEMAEGDT résistant
était dans ce convoi et a été immatriculé à Dachau sous le N° 76733. Je suis
fier qu’il ait été résistant. Fin de parenthèse).
Dans
leur malheur Paul CHAMPEAU et ses camarades de détention de Riom ont la chance
de se trouver dans un wagon où ils ne sont que 80. Sur les wagons à l’époque il
était écrit : Chevaux 8 Hommes 40.Ils arrivent tous vivants à Dachau le 5
juillet. Selon le livre mémorial de la Fondation pour la Mémoire de la
Déportation il y eut 530 morts, soit un quart du convoi. Ces 530
victimes vont partir directement au
crématoire.
Après
la quarantaine au cours de laquelle les déportés reçoivent la tenue rayée et un
numéro de matricule, ils sont répartis dans des Kommandos (c’est-à-dire des
petits camps affectés à des tâches particulières). Sur les 23, 19 seront affectés
aux camps du Neckar où ils travaillent dans des mines.
Quant
à Henri NAVROT et Jacques VINCENT, ils seront affectés au Kommando d’Hersbrück,
pour installer une usine souterraine fabriquant des moteurs d’avion. Il s’agit
d’ un Kommando très dur (usine souterraine). Selon le livre mémorial de la
Fondation pour la Mémoire de la Déportation, sur les 10000 qui y ont été
affectés, 4000 y sont morts.
Henri
NAVROT (19 ans) et Jacques VINCENT (20
ans) font partie des 9 résistants du
Maquis de la Pourrière déportés et décédés en Allemagne qui sont morts pour que
Vive la République.
Epilogue
1 : Après la libération le 2 juin 1945 Gouverneur est reconnu
à Cusset par un déporté
survivant. Georges Gouverneur qui a dénoncé le maquis et rejoint la milice est
pendu par les pieds à deux reprises mais en réchappe, car la corde casse.
Condamné à mort puis à la prison à perpétuité, il est gracié par le général De
GAULLE, car il fallait revenir à l’Etat de Droit, à la légalité républicaine.
On ne peut pas se faire justice soi-même sinon c’est la porte ouverte à tous
les excès, règlements de comptes, guerre civile. Toute personne, même les
traîtres, même le pire des salopards, a droit à un procès. Georges GOUVERNEUR
est resté protégé jusqu’à sa mort et même au-delà.
Epilogue 2 : les Groupes Mobiles de
Réserve qui ont arrêté les résistants du Maquis de la Pourrière, seront dissous
à la Libération et remplacés, après épuration des éléments collaborationnistes,
par les Compagnies Républicaines de Sécurité, les CRS.
Nous
vous remercions pour votre attention.
F.Demaegdt
AFMD de l’Allier
Les
Virots
03210-Chemilly
Tel
: 04 70 44 51 46
afmddelallier@orange.fr
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